L’itinéraire de ce numéro est consacré à la ville d’Agrigente. Capitale italienne de la culture pour l’année 2025, Agrigente est le résultat de siècles de dominations successives qui ont modelé son identité. Fondée en 580 av. J.-C. en tant qu’Akragas, elle devint une cité puissante de la Grande Grèce. Les Romains la conquirent en 210 av. J.-C., la transformant en Agrigentum et la dotant d’infrastructures et de nouvelles influences culturelles. Après la chute de Rome, Byzantins et Arabes laissèrent leur empreinte : les Arabes (827 ap. J.-C.) la rebaptisèrent Gergent et développèrent son économie et son agriculture. Avec les Normands (1086), la ville devint à nouveau chrétienne et donna vie à la majestueuse cathédrale Saint-Gerland. Souabes, Angevins, Aragonais, apportèrent de nouvelles architectures et traditions jusqu’à l’époque des Bourbons et de l’Unité de l’Italie.
Pour en venir au temps présent, mais où est passée la Gauche en Italie ? Alors que Giorgia Meloni se présente comme une leader solide et résolue, la réalité est bien différente : derrière les actions symboliques et la propagande se cachent la débâcle du système de santé, une école sans vision d’avenir et un pays toujours plus divisé. Et la Gauche ? Au lieu de dénoncer cette hypocrisie, elle reste empêtrée dans les doutes et les divisions. Il lui manque une identité claire, et le pays attend des réponses concrètes. Or le temps lui est compté pour se recomposer.
En attendant, les distractions ne manquent pas : Sanremo, qui vient de vivre sa 75e édition n’est pas uniquement un festival de musique, c’est un miroir de l’Italie. Entre polémiques, looks discutables et audiences astronomiques, la scène du théâtre Ariston raconte l’Italie mieux que tous les traités sociologiques et si les chansons disparaissent avec le temps, le festival demeure parce que Sanremo est un moment au cours duquel des millions d’Italiens, aussi enthousiastes que féroces critiques, se reconnaissent dans une tradition qui mêle nostalgie et modernité. Au fond, peu importe qui gagne : l’essentiel est qu’on en parle. Et, comme chaque année, on en parle.
Quittons maintenant le petit écran pour le grand : Roberto Andò, réalisateur au regard profond et subtil, revient avec un nouveau film, L’Abbaglio.Une œuvre de relecture de l’un des moments les plus cruciaux de l’Histoire italienne : le débarquement des Mille en Sicile. Dans une interview exclusive pour RADICI, il nous décrit le film comme étant une réflexion sur le Risorgimento, vu non seulement comme un événement historique mais aussi comme un processus humain, composé d’idéaux, de contradictions et de sacrifices. « L’Abbaglio du titre, l’éblouissement ou la bévue, rappelle les fausses promesses et les illusions de ceux qui ont vécu cette période, mais aussi la lumière d’un projet d’unité qui a changé notre pays », explique le réalisateur.
Nous nous sommes également penchés sur le travail d’un autre Sicilien, lui aussi réalisateur. Le génie visuel de Giuseppe Tornatore se manifeste cette fois sous une autre forme : la photographie. Le réalisateur, connu pour ses films et en particulier pour Nuovo Cinema Paradiso, nous offre un regard intime et poétique à travers une série de clichés qui racontent la Sicile et son peuple mais aussi la Sibérie. Chaque photographie est une fenêtre sur un monde imprégné de mémoire, d’émotions et d’identités. Un support puissant pour préserver et partager ses racines culturelles.
À propos de racines, l’inauguration à Nogent-sur-Marne en janvier dernier du monument à la mémoire de l’émigration italienne marque un moment de profonde réflexion et de reconnaissance de la contribution des Italiens à l’Histoire de France. L’œuvre, symbole de sacrifice et de résilience, célèbre les générations d’émigrants qui, avec courage et détermination, ont construit un pont culturel et social entre les deux pays. Un monument qui n’est pas seulement un hommage au passé, mais aussi un avertissement pour le présent nous rappelant la valeur de l’inclusion et de la solidarité dans un monde toujours plus interconnecté mais où l’humanité fait souvent défaut.
Notre série historique sur l’Italie avant l’Unité se poursuit : après la chute de Napoléon, le Congrès de Vienne (1814-1815) réorganise la péninsule italienne, rétablissant les dynasties de l’Ancien Régime et consolidant l’influence autrichienne. Censure et répression dominent cette période conservatrice, marquée par des révoltes réprimées (1820-1831). En dépit du développement industriel limité, des initiatives comme le réseau ferroviaire piémontais laissent présager un boom économique. Inspiré par Mazzini, Gioberti et Cavour, le Risorgimento voit le jour, et il constituera plus tard les bases de l’unification italienne contre les divisions imposées par « l’ordre de Vienne ».
Pour finir, telle une cerise sur le gâteau, nous vous proposons quelques pages consacrées à la pâtisserie italienne qui représente à elle seule une histoire de saveurs, de cultures et de souvenirs traversant les siècles. Chaque dessert incarne le lien profond avec le territoire et les traditions. Depuis les cantucci croquants toscans jusqu’aux baroques cannoli siciliens, la variété est miroir de l’histoire et de la créativité du pays. Cet art n’est pas seulement une célébration du goût mais un patrimoine culturel qui réunit les générations.
Rocco Femia, éditeur et journaliste, a fait des études de droit en Italie puis s’est installé en France où il vit depuis 30 ans.
En 2002 a fondé le magazine RADICI qui continue de diriger.
Il a à son actif plusieurs publications et de nombreuses collaborations avec des journaux italiens et français.
Livres écrits : A cœur ouvert (1994 Nouvelle Cité éditions) Cette Italie qui m'en chante (collectif - 2005 EDITALIE ) Au cœur des racines et des hommes (collectif - 2007 EDITALIE). ITALIENS 150 ans d'émigration en France et ailleurs - 2011 EDITALIE). ITALIENS, quand les émigrés c'était nous (collectif 2013 - Mediabook livre+CD).
Il est aussi producteur de nombreux spectacles de musiques et de théâtre.