« Notre méditerranée », tel est le terme employé par Mattéo Renzi lors de son discours devant le Parlement Européen, le 2 juillet dernier. Voilà le Président du Conseil Italien parti pour une traversée de six mois à la barre de l’Union Européenne. Un « Télémaque » qui entame son Odyssée sensée redonner un souffle de jeunesse à l’institution.

Cette « Mare Nostrum » c’est aussi le nom de l’opération de sauvetage des naufragés de l’immigration qui viennent s’échouer sur les plages des îles de la Péninsule, Lampedusa ou Sicile. Quelle politique pourra bien mettre en place l’Union Européenne pour lutter contre les drames qui font que des êtres humains, pour s’extraire de leur calvaire quotidien mettent leur vie en péril dans des embarcations de fortune ?

La Mare Nostrum, c’est encore cet horizon que contemplent depuis bientôt trois étés les habitants du Giglio, qui se réveillent chaque matin face à la carcasse du Costa Concordia. Une troisième année face à cet immeuble flottant de l’horreur et de l’absurde ? Impensable. Sa remise à flot est prévue dans les prochains jours pour un remorquage vers le port de Gênes.

Et puis Mare Nostrum c’est aussi cette Méditerranée dans laquelle nos corps se plongent pour se régénérer l’été et les vacances venues. Albert Camus a très poétiquement décris ce sentiment de bien-être, enveloppé par cette mer, notre mer, dans « Noces à Tipasa ».

Il me faut être nu et puis plonger dans la mer, encore tout parfumé des essences de la terre, laver celles-ci dans celle-là, et nouer sur ma peau l’étreinte pour laquelle soupirent lèvres à lèvres depuis si longtemps la terre et la mer. Entré dans l’eau, c’est le saisissement, la montée d’une glu froide et opaque, puis le plongeon dans le bourdonnement des oreilles, le nez coulant et la bouche amère -la nage, les bras vernis d’eau sortis de la mer pour se dorer dans le soleil et rabattus dans une torsion de tous les muscles ; la course de l’eau sur mon corps, cette possession tumultueuse de l’onde par mes jambes – et l’absence d’horizon. Sur le rivage, c’est la chute dans le sable, abandonné au monde, rentré dans ma pesanteur de chair et d’os, abruti de soleil, avec, de loin en loin, un regard pour mes bras où les flaques de peau sèche découvrent, avec le glissement de l’eau, le duvet blond et la poussière de sel. Je comprends ici ce qu’on appelle gloire: le droit d’aimer sans mesure.

A défaut de celles de Tipasa, heureux ceux qui cet été iront fouler les plages italiennes, en Ligurie, en Toscane, dans les Pouilles, en Sicile, sur la côte adriatique ou encore sur cent autres plages de la péninsule. Ils y redécouvriront la langueur, l’insouciance et la vie sans courir après le temps. Bon vent à eux…

Patrick Noviello
Plus de publications

Patrick Noviello est journaliste à France3 Occitanie. Il enseigne à l’Ecole de Journalisme de Toulouse dont il est issu. Il collabore à Radici depuis 2012. Sa dernière conférence théâtralisée « C’est moi c’est l’Italien » aborde, à travers l’histoire de sa famille, les questions liées aux migrations.