Du 2 au 30 mai
Les clichés sont légion sur Naples, la ville la plus filmée d’Italie après Rome. Alors, il y aura de la pizza, la Camorra, des Vespa et la mamma ? Oui, il y en aura aussi, mais Naples ne se réduit à rien de tout cela, car c’est une ville‑oxymore où les contraires s’incorporent et se réinventent sans cesse, dans une vitalité féroce, déjouant toutes les cartes postales figées.
On pourrait décliner à l’envi le titre du film culte Misère et Noblesse : ici se mêlent le profane et le sacré, le public et l’intime, le trivial et le sublime, la terre et la mer, l’Europe et l’Orient, le passé et le présent, la fable et le réel dans toute son âpreté (Bella e Perduta).
Qu’elle joue une paysanne sauvageonne (La Belle et le Cavalier) ou une mère de famille qui vend des cigarettes de contrebande (Hier, aujourd’hui, demain), Sophia Loren est toujours une reine qui traverse majestueusement la ville. Dans L’Or de Naples, une même scène contient le drame, le deuil, la farce et… les pâtes.
Naples est réputée pour ses mâles qui arpentent les rues en dragueurs conquérants (L’Amour meurtri, adapté du premier roman d’Elena Ferrante, dépeint un espace étouffant pour l’héroïne sous le regard constant des hommes), mais c’est aussi ici que la cinéaste pionnière du muet, Elvira Notari, a tourné des films majeurs en extérieur au début du XXe siècle (La Petite, Sainte Nuit).
« Naples est un théâtre en plein air », disait l’immense dramaturge, acteur et metteur en scène Eduardo De Filippo, dont le travail a inspiré de grands films (Mariage à l’italienne) et féconde encore aujourd’hui le jeune cinéma (L’Étoffe des rêves). Toni Servillo (Un homme de plus, Un tigre parmi les singes) qui le revendique comme son maître, déclare : « À Naples, la vie n’existe pas sans sa représentation, et la représentation n’existe pas sans la vie. Cette confusion entre la réalité et son reflet joué est la blessure magnifique de cette ville où tout se mêle, la chanson, la poésie, la langue, la vie, pour former un miracle qui est celui de la représentation, dans une culture à la fois très populaire et très élevée. »