Pourquoi un artiste va-t-il remplir des stades en Allemagne et ne pas se produire en France ? Les affres de la scène musicale… Mais Pippo Pollina les a surmontés. Le chanteur-compositeur italien installé à Zurich débute une tournée dans l’hexagone le 7 octobre à Paris avant le 10 à Pessac, le 11 à Toulouse et le 12 à Avignon. L’occasion de découvrir un artiste hors-normes, à plusieurs chefs.
Vingt-deux albums déjà, il était temps que le chanteur engagé franchisse les Alpes. Une carrière déjà longue donc, et parsemée de succès, mais la vie du sicilien n’a pas été qu’un parcours semé de roses. Il a aussi gouté aux épines de l’existence notamment du temps où il écrivait pour « I siciliani ». Sa deuxième vie commence en 1984 quand Giuseppe Fava, son mentor dans le monde du journalisme, est abattu par la mafia sicilienne.
Engagé, du journalisme à la chanson
« Nous avons retrouvé en lui cette vision selon laquelle la lutte politique et la lutte contre la mafia allaient de pair. Les rédacteurs de la revue étaient très jeunes, entre 28 et 29 ans, ils étaient très forts, c’étaient des fous déchaînés ! Ce n’était pas rien, dans ce contexte, de dénoncer sans mâcher ses mots » raconte-t-il à Fausto Pellegrini qui l’a rencontré pour Rainews24. Cet engagement, Pollina l’a conservé dans sa nouvelle vie de musicien.
« Chacun doit s’engager avec ses moyens » explique le chanteur qui cite notamment Pasolini ou De André. « Moi, je mène ma bataille à travers la musique. Et sans Internet peut-être que je ne serais pas ici, la toile me permet de rencontrer des gens et de trouver des synergies, même si la chanson d’auteur est un art désuet qui plaît à peu de gens. Mais parmi ces gens-là, il y en a sûrement encore beaucoup qui ne me connaissent pas et qui pourraient m’apprécier. »
Très présent sur les réseaux sociaux, avec une toile qui permet également de le voir sur scène à travers toute l’Europe, Pippo Pollina peut d’ailleurs être découvert par ce biais-là. A voir notamment son concert à Lugano en 2014 et un duo remarquée avec Giorgio Conte (frère de Paolo) sur Mare, mare, mare.
Ce spectacle donne sur ses deux heures un large aperçu des possibilités de Pippo Pollina : une orchestration au cordeau, une voix douce mais qui sait s’imposer sur les instruments et une poésie mêlant sens de la rime, imaginaire mais aussi thèmes d’actualités. « Avoir des utopies nous rend plus heureux, même si nous devons presque admettre l’impossibilité de les réaliser »
Le nouveau Gianmaria Testa ?
Sans tomber dans de faciles raccourcis, il est aussi souvent défini en France comme le nouveau Gianmaria Testa. Ce dernier très populaire chez nous et aujourd’hui disparu, une fenêtre de tir se dégage donc pour l’artiste sicilien. « Depuis la mort prématurée de Gianmaria Testa, on sent le besoin d’une représentation en chanson du monde italien du lyrique et de la composition. Je suis prêt à relever ce défi, conscient que le public français, bien qu’exigeant, est le bon pour accueillir mon message » reconnaît volontiers Pippo Pollina.
Pour résumer, on peut dire qu’avec Pollina c’est aussi cette chanson parfois injustement qualifiée de « variété populaire » que l’on retrouve, celle qu’on reprend le soir, entre amis, autour d’une guitare, celle dont on se souvient aussi des paroles toute une vie, celle qui sait plus que nulle autre toucher le public le plus large. Souhaitons qu’elle touche celui de France.
Site officiel
Tournée Pippo Pollina : le 7 octobre à Paris Théâtre des trois baudets, le 10 à Pessac au Galet, le 11 à Toulouse au Rex et le 12 à Avignon au théâtre Golovine.
Patrick Noviello est journaliste à France3 Occitanie. Il enseigne à l’Ecole de Journalisme de Toulouse dont il est issu. Il collabore à Radici depuis 2012. Sa dernière conférence théâtralisée « C’est moi c’est l’Italien » aborde, à travers l’histoire de sa famille, les questions liées aux migrations.