C’est le cœur du discours de Roberto Benigni devant le pape et les 50 000 enfants présents à l’occasion de la première Journée mondiale de l’enfance le 26 mai dernier à Rome. Le réalisateur du film La vie est belle nous donne une nouvelle leçon d’amour et de paix en temps de guerre.

par la Rédaction

« Je voudrais vous serrer dans mes bras, vous embrasser… » Sur le parvis de la basilique Saint-Pierre, Roberto Benigni est comme un fleuve en crue. « Vous êtes argentin, nous pouvons danser un tango », a-t-il continué en racontant que deux gardes suisses, avant le début de son discours, l’avaient prévenu : « Vous pouvez tout faire sauf toucher le Saint-Père ». «Et maintenant, je ne pense qu’à ça ». « Comme Adam et Eve… » « Je peux vous embrasser ? À quoi servent les baisers si on ne les donne pas ? », a-t-il poursuivi avant de s’approcher de l’autel et d’embrasser le pape François.

Un peu plus tôt, il s’était adressé aux enfants avec ces mots. 

« Prenez votre envol, prenez votre vie en main et faites-en un chef-d’œuvre, vous pouvez le faire ! Construisez un monde meilleur, rendez-le plus beau que ce que nous avons pu faire. Rendez le monde plus beau. C’est plus facile qu’il n’y paraît, vous savez pourquoi ? Parce que c’est lui qui veut être plus beau. Le monde a besoin d’être beau, il en a besoin, et vous pouvez le faire, vous devez le faire. Le monde a besoin d’être beau ». Un monde qui est « gouverné par des gens qui ne savent pas ce qu’est la miséricorde, l’amour. Des gens qui commettent le plus grave et le plus stupide des péchés : la guerre ». La guerre, « ce mot horrible à entendre »,  qui « salit tout ».

« Nous devons mettre fin à cette chose. Moi je vois que quand des enfants jouent à la guerre, dès que l’un d’entre eux se fait mal, ils s’arrêtent, le jeu est terminé. Mais pourquoi, lorsqu’on fait la guerre, au premier enfant qui souffre, on ne s’arrête pas ? Pourquoi ? Quelle lâcheté. La guerre doit cesser, elle doit cesser. Ce que nous disons peut devenir vrai. Il faut trouver les mots justes, ceux qui font que les choses deviennent vraies. Personne n’a trouvé le mot juste pour arrêter la guerre, un peu comme “Sésame ouvre-toi”, “guerre, arrête-toi”. Pourtant, je suis sûr que parmi vous, il y a ceux qui trouveront le mot pour arrêter la guerre à jamais. Ce mot existe, nous devons le chercher ensemble ».

« Chacun d’entre vous apporte sa contribution, si petite soit-elle, au bien. Essayez de faire des choses belles, de rendre les autres heureux, et pour cela, vous devez être heureux. Soyez heureux, devenez l’adulte que vous auriez voulu à vos côtés quand vous étiez enfant. Les enfants sont notre avenir, la joie de demain, une chose merveilleuse. Peut-être y a-t-il parmi vous un nouveau Michel-Ange, un nouveau Galilée, une nouvelle Rita Levi Montalcini. Ou même le nouveau pape, ou deux ou trois, on ne sait jamais. […] tout est possible, même que l’un d’entre vous devienne pape, peut-être le premier Africain ou Asiatique de l’histoire, ou de Rome, du Testaccio [quartier romain, ndr], ou la première femme pape de l’histoire, imaginez quelle affaire ! ».

« Pour finir, voici une proposition, ou plutôt une belle idée, une idée magnifique : J’ai presque envie, pour les prochaines élections, de me présenter moi aussi. Pas après vous, avec vous. Mettons-nous ensemble et nous ratisserons large. Inscrivons Jorge Mario Bergoglio dit François sur le bulletin, nous gagnerons tout de suite ».

Avec vivacité, Roberto Benigni a rappelé la force des enfants qui savent « regarder avec le cœur et non avec les yeux ». Il a ensuite raconté que, caché dans la foule d’une paroisse romaine, il avait entendu Bergoglio dire de laisser les petits crier, « parce que la voix des enfants dans une église est plus belle que celle des homélies des prêtres, des évêques et même du pape ».  

« Nous n’avons pas encore trouvé le mot magique pour dire “guerre, arrête-toi !”, mais je suis sûr que quelqu’un parmi vous le trouvera, nous devons juste vous aider à le chercher, en vous aimant et en vous racontant des histoires qui vous font rire, parce qu’il n’y a rien de plus beau au monde que le rire d’un enfant ! Et si un jour tous les enfants du monde, sans exception, peuvent rire ensemble, ce sera un grand jour, ce sera le plus beau jour de l’histoire du monde ! »

Le temps passe mais pour le grand réalisateur et acteur, la vie est toujours belle et, comme le petit Josué de son inoubliable film, la paix passera par le regard des enfants sur la vie.